Ces rêves qu’on piétine
Sébastien Spitzer
Editions de l’Observatoire - 2017
Editions Le livre de Poche - janvier 2019
4 /5
L’histoire s’ouvre sur la marche de la mort d’Aimé qui reste tellement humain malgré la déshumanisation dont tous les prisonniers des camps de concentration sont victimes. Il s’accroche à la vie parce que chez lui brille encore une mince et fragile lueur d’espoir mais aussi parce que dans la doublure de sa veste, un vieux rouleau de cuir est caché, renfermant toutes les lettres qu’il lui a écrites durant la guerre. De main en main, d’homme en femme, de destins en destinées, ce rouleau parcourra les routes et permettra à la mémoire du père de Magda et à la mémoire collective de ne pas s’effacer, d’éclater au grand jour. Pour que l’on n’oublie jamais ce que cette fille a fait à son père ; ce les hommes ont fait aux hommes.
Enfin, on découvre Magda, la femme la plus puissante du IIIème Reich. Un IIIème Reich qui tombe en lambeau. Elle assiste à la dernière représentation de l’orchestre philharmonique où des capsules de cyanure sont distribuées comme des bonbons pendant que le IIIème Reich s’effondre. Elle ira ensuite se claquemurer dans un bunker sombre et humide où ses souvenirs s’exhumeront amères, lourds et sans joie.
J’ai espéré en suivant tour à tour Aimé, Judas, Fela et Ava. J’ai suivi avec une appréhension certaine leur marche, leurs aventures et leur survie en essayant de ne pas m’attacher à eux, parce que dans ce monde, la vie n’est pas acquise et les fins tragiques claquent aussi vite que sifflent les balles des fusils.
J’ai aimé lire les fragments de leurs histoires passées et présentes. Je voulais connaître leur destin et j’avais tellement envie que Magda soit enfin confrontée à ces lettres.
Ce roman dévoile la Seconde Guerre à travers les derniers jours de l’existence de Magda Goebbels mais surtout à travers le prisme de personnages à la fois très différents les uns des autres mais terriblement attachants. Cette lecture offre une approche de la guerre inédite, du moins, par rapport à tout ce que j'avais pu lire jusqu’à présent. J’ai vraiment apprécié ce roman ! L’auteur a fait d’innombrables recherches afin d’ancrer son histoire dans la réalité et l’exactitude des faits et des lieux, mais cela ne plombe pas le récit. Il est fluide et particulièrement bien écrit. Ce n’est ni larmoyant, ni insoutenable. Le ton est juste, les émotions présentes mais pas envahissantes.
J’avoue que j’ai moins apprécié les chapitres sur Magda, non pas à cause de la plume ou de l’histoire, mais parce que je n’ai eu aucune empathie positive ou négative pour cette femme qui s’est hissée au sommet à n’importe quel prix. (Je me sens immature comme lectrice en expliquant cela... mais c’est un fait. Il faut que quelque chose se passe avec le personnage sinon j’apprécie moins ma lecture) C’est un jugement très très personnel.
Je remercie chaleureusement Le Livre de Poche qui m’a proposé cette lecture. Sans eux, je serais passée à côté d’un très bon roman.
En bref : un roman qui aborde la Seconde Guerre sous une approche à la fois différente et superbement racontée.