Maintenant que tu le dis…
Auteur : Kristan Higgins
Éditeur : Harper Collins (16/10/2019)
Résumé :
Quand Nora Stuart, jeune gastroentérologue, saute le pas et décide de revenir à Scupper Island, son île natale qu'elle avait soigneusement évitée depuis 15 ans. Elle espérait que les habitants de l'île lui auraient pardonné tout ce qu'ils lui reprochaient au lycée, mais c'est raté. Quant à l'accueil de sa mère et de sa nièce, il est tout aussi froid.
Pourtant, avec son optimisme et sa détermination sans faille, Nora est prête à tout pour ressouder sa famille et passer un bon été sur cette île qui n'oublie jamais rien.
Je me suis demandé si je n'avais peut-être pas raté de possibles amitiés tant je m'étais murée dans mon malheur.
Avis :
Lorsque les Editions Harper Collins m’ont proposé de découvrir Maintenant que tu le dis… j’ai trouvé le résumé plutôt sympa et je me suis dit pourquoi pas ? Je me suis plongée dans ma lecture sans attente particulière, si ce n’est de passer un moment sympa, et plus je tournais les pages, plus j’aimais ! Maintenant que tu le dis… a été un coup de cœur inattendu, peut-être parce qu’il est tombé au bon moment, peut-être parce qu’il m’a parlé ; en tout cas je l’ai trouvé très bien écrit, drôle, émouvant, révoltant parfois. J’ai adoré l’état d’esprit de Nora et le ton un peu décalé du récit. Il y a plein de vie (donc des mauvaises choses aussi) mais surtout plein d’espoir dans ce roman.
Entre la nostalgie d’une enfance merveilleuse et un présent en apparence idyllique, mais tellement vide de sens, Nora Stuart cherche à comprendre son passé et l'évènement qui a tout fait basculer : le départ de son père. Pour cela, elle devra composer avec son moi passé, la mal-aimée, et son moi actuel, le médecin estimé, pour trouver le juste milieu et réussir à être vraiment elle-même. Avis aux potterhead, Nora en est elle-même une, et le récit est truffé d’allusions à l’œuvre de J.K. Rowling.
Kristan Higgins nous offre, à travers Maintenant que tu le dis…, une intrigue centrée sur la recherche de soi. Nora a traversé de sales moment dans la vie, mais loin de s’en apitoyer (même si parfois, elle fait le compte de ce qui cloche), elle fera ce qu’il faut pour devenir une autre et s’accomplir en tant que femme. Elle travaillera très dur pour y arriver, n’en déplaise aux mauvaises langues qui auraient pu la prendre en grippe. La question est : la solution est-elle vraiment de devenir quelqu’un d’autre ? une meilleurs version de soi-même ? Quoi qu’il en soit, Nora s’en rendra compte en frôlant la mort, elle doit renouer avec ses racines et accepter son passé pour avancer.
Si Nora ne vit pas dans le passé, celui-ci a tout de même une très grande importance pour elle, elle est incapable de couper les ponts avec sa famille et d’oublier les événements traumatisants qu’elle a traversé. Le retour sur son île ne se fera pas sans remous et c’est aussi valable pour notre cœur qui se verra plus d’une fois serré. L’auteure évoque les difficultés à communiquer avec sa famille, malgré l’amour tacite existant, les choses dont on ne parle pas, pour protéger, ou parce que ce ne sont pas des choses dont on parle ; c’est ainsi que naissent les secrets de famille et ils sont rarement bons. Nora va s’accrocher de toutes ses forces pour faire valoir sa place et son droit d’exister, pour accepter qu’elle a bien mérité la bourse qu’elle a obtenue, sans spolier personne. Car Nora fait partie de ses personnes contre lesquelles il est si facile de s'acharner : grosse, laide (c’est du moins l’image qu’elle a d’elle-même durant son adolescence), elle est hypersensible et a le cœur sur la main, prête à tout pour retrouver sa petite sœur.
Harcèlement scolaire, obésité, agression, maladie, handicap, drogue, délinquance, manipulateur… tout un tas de sujets malheureusement de plus en plus fréquents, parfois tus, étouffés ou devant lesquels on détourne le regard ; tout un tas de sujets que Kristan Higgins évoque ici, qui ont une incidence sur le vécu des personnages et qui sont traités, je trouve, avec justesse et bienveillance. Des sujets qui amènent à réfléchir, à voir les choses différemment, et surtout à se bouger pour combattre les préjugés.
L’auteure nous balade entre le passé et le présent de Nora, nous éclairant, au gré des flash-back sur ce qu’elle a perdu, sur ce qu’elle a fui, sur la manière dont elle a mis toutes les chances de son côté, quitte à ne pas être en paix avec sa conscience (et dieu sait que la sienne est particulièrement culpabilisante). Maintenant que tu le dis… donne également une vision de la vie en petite communauté, dans un milieu fermé, où tout le monde connait tout le monde et le moindre faux pas passé à la loupe ; un milieu où être différent ne passe jamais inaperçu, où les préjugés sont peut-être un peu plus durs.
Malgré tout, l’espoir et la persévérance sont omniprésents dans le récit qui n’est en aucun cas larmoyant. Les personnages sont très intéressants, on s’y attache ou les déteste très facilement, ne comprenant pas toujours leur manière de faire. Mais chaque action, chaque parole, chaque acte manqué est cohérent. Nora en arrivera à se rendre compte qu’en se focalisant sur les mauvaises choses, on en arrive à passer à côté de ce qui est bien.
Dernier point que j’ai trouvé très appréciable, s’il y a plus ou moins une romance qui prend forme dans le roman, celle-ci est vraiment discrète et fait très réaliste. Pas de prince charmant ni de cheval blanc, et surtout, cela n’étouffe pas les autres sujets abordés et l’objectif principal de Nora : sa famille.
Un roman qui m’a vraiment parlé, qui se lit très facilement, drôle, avec des personnages forts malgré leurs faiblesses, fidèles à eux même et attachants. Je serai bien restée encore un peu sur Scupper Island…
- J'ai rencontré quelqu'un […] Un beau mec qui a un boulot, qui n'habite pas chez sa grand-mère, qui a à peu près mon âge et veut des enfants. - Une licorne ? suggérai-je. On pouffa toutes de rire. [...] - Il portait un polo de rugby vert et gris… - Non ! brailla Xiaowen. - Plaque-le, lâchai-je. Les autres nous décochèrent un regard interdit. - Qu'est ce qu'il vous prend ? s'écria Poe. - C'est un Serpentard, expliquai-je. Le vert et l'argent sont les couleurs des Serpentards.