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Les os des filles - Line Papin


Les os des filles

Line Papin


Éditions Stock

Edition Livre de Poche

Lorsque j’ai refermé ce livre, je me suis dit, c’est magnifique. Magnifique de poser de tels mots sur les couches successives qui forment une si jeune vie, sur des lambeaux d’existence, des guerres intérieures. Avoir un tel recul. Une telle puissante évocatrice. Écrire tant de désespoir et s’apercevoir que tout se noir peut devenir une merveilleuse ode à la vie. Lire Les os des filles, c’est ce laisser conter une histoire. Celle de Line. Celle d’une dualité multiple. D’un côté, il y a Hanoï, son enfance insouciante et son goût de paradis, son histoire, ses racines, ses générations d’os, le soleil, sa chaleur et sa moiteur, ses bonheurs infinis et son tumulte. De l’autre, il y a la longue, l’interminable nuit française, si froide et insondable. L’adolescence parisienne, ses guerres intérieures qui implosent comme on valdingue en descendant aux enfers; la peau se pare de bleus, la chair s’effiloche, les os s’entrechoquent. Et en filigrane, la mère génitrice, la deuxième sœur H. Si proche mais terriblement lointaine.


D’un point de vue plus formel, la syntaxe danse, tourbillonne, avance, recule et s’affranchit des codes pour nous offrir un langage poétique . Les mots valsent. Il sont libres et pourtant si lourd de sens. Et puis il y a ce narrateur omniscient qui d’un seul coup devient "je" pour mieux s’oublier à nouveau et se réincarner dans la distance d’un "tu" mais le plus souvent, d’un "elle" plus sage et détaché.


Enfin, je conclurais sur ces mots qui ne sont pas les miens, mais qui ont une résonance particulière en moi, pour les avoir éprouvé il y a longtemps, déjà : "Entre les eaux d’où l’on vient et les os qu’on laisse en partant, il y a tant de charge. Rester parce que l’on est, c’est une chose que l’on a tous comprise [...]. Nous sommes là. Rester parce que l’on est, c’est à peine un choix, mais nous décidons peut-être de la manière dont nous voulons rester, dont nous voulons être." En bref : une ode à la vie empreinte d’un puissante force évocatrice.


"Elles veulent mourir vivantes, elles veulent vivre mortes." "C’est une gamine, maintenant, qui ne grandira plus, qui n’aura pas d’enfant, qui est debout seule sur terre, sans passé, sans futur, sans vie, cassée et qu’on ne peut plus as sauver. C’est une gamine, c’est un solfège sans musique, qui doit se sauver sans raison, qui doit rester parce qu’elle est. Expliquez-lui cela ? Donnez-lui envie ?" "Tu te souviens. Je me souviens. Je n’oublie pas ton visage, mon visage émacié, la manière dont tu es morte, dont je suis morte, dont nous nous sommes tenues la main toutes les deux, au-dessus de ces chiottes, toi la petite fille déchirée, prête à crever, moi qui ferais tout pour guérir." 

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