Les sœurs de Montmorts
Auteur : Jérôme Loubry
Éditeur : CALMANN-LÉVY (25/08/2021)
414 pages
Résumé : Novembre 2021. Julien Perrault vient d’être nommé chef de la police de Montmorts, village isolé desservi par une unique route. Alors qu’il s’imaginait atterrir au bout du monde, il découvre un endroit cossu, aux rues d’une propreté immaculée, et équipé d’un système de surveillance dernier cri. Mais quelque chose détonne dans cette atmosphère trop calme. Est-ce la silhouette menaçante de la montagne des Morts qui surplombe le village ? Les voix et les superstitions qui hantent les habitants ? Les décès violents qui jalonnent l’histoire des lieux ?
Je pense que vous avez assez vécu pour savoir que les femmes ont toutes un pouvoir spécial… Autrefois, elles n'avaient guère d'importance, sinon celle d'engendrer. L'Eglise ne les considérait pas, pas plus que leurs maris ou la société. Mais parmi elles, certaines se montraient plus magiques que leurs congénères. Par leur beauté, leur intelligence, leur sensibilité, par leur faculté à se servir de la nature pour guérir les maladies, par leurs paroles qui résonnaient bizarrement à l'intérieur des petits esprits. Alors, puisque les hommes épris ne pouvait avouer qu'elles leur étaient supérieures, ils les rabaissèrent en un terme obscur et condamnable : sorcières. Ainsi, la magie intrinsèque d'une femme devint une malédiction et toutes ces jolies fleurs se fanèrent de gré ou de force.
Avis :
Est-ce que j'ai lu tous les Jérôme Loubry ? Presque ! (il me manque son premier roman). Est-ce c'est devenu un auteur incontournable dont je ne pouvais pas ne pas lire le dernier sorti ? Oui ! Il me semble que je n'ai d'ailleurs pas lu le résumé avant d'entamer ma lecture.
La plume de Jérôme Loubry est plutôt prenante, on ne peut pas le nier. Dès le départ, nous sommes plongés dans une atmosphère assez particulière, avec des personnages qui ne sont pas vraiment attachants, aux comportements parfois perturbants et surtout, qui semblent tous avoir quelque chose à se reprocher, un vilain secret profondément enfoui. Si, comme moi, vous avez déjà lu du Jérôme Loubry, vous aurez forcément cette attente de LA révélation; ce sentiment que la lecture doit se faire sur deux tableaux et que, vous n'avez pas les clés pour accéder au second. D'une certaine manière, cela m'a un peu frustrée. Je poursuivais ma lecture pour enfin, pouvoir accéder au COMMENT, et non pas parce que j'étais entrainée par le récit. Récit qui, il faut le dire, est assez dérangeant.
En parallèle du quotidien cet étrange village, l'auteur aborde la chasse aux sorcières. Il nous plonge dans une ambiance étouffante, presque malsaine et les personnages, tout comme l'atmosphère, sont hantés par ces sorcières des temps passés (ou pas si passés que ça). Tout semble se rapporter à une époque révolue tandis que les légendes ont totalement envahi la vie des villageois. L'auteur, au fil de ses mots, nous offre par moment, de très belles analyses ou comparaisons sur les femmes et la magie.
En filigrane, un blog et l'hiver. Cet hiver omniprésent qui ajoute, si c'était possible, un touche de noirceur en plus. Tout n'est que flocon de neige est le leitmotiv de l'histoire. Rien ne dure, rien n'a d'importance.
Le récit est extrêmement lent et véhicule une sensation de lourdeur, le lecteur se trouve englué dans un environnement nocif dont il ne sait pas s'il pourra ressortir indemne. Au même titre que la journaliste qui découvre ce qu'il s'est réellement déroulé dans à Montmorts, il se pose en spectateur, impuissant, et assiste sans comprendre à la tragédie qui s'y joue.
Je suis très partagée sur le ressenti; quelque chose d'à la fois oppressant et une sensation de voyeurisme. Un spectacle sanglant, peu être un peu gratuit. Si le roman se lit relativement vite, je l'ai pourtant trouvé long; long à se mettre en place. Le twist final est bien là, attendu sans l'être, car je n'avais pas imaginé l'ombre de la vérité. J'ai beaucoup apprécié les derniers chapitres, ceux qui font le lien entre ce que l'on a lu et ce qu'on aurait dû lire.
Cela fait presque une semaine que j'ai terminé ma lecture, tard dans la soirée car il me fallait absolument connaitre le fin mot de l'histoire. Bizarrement, Jérôme Loubry a également su créer une sorte d'addictivité, surtout quand tout semble devenir hors de contrôle. J'en conserve une impression de malaise, doublée d'une sensation de gâchis. J'y ai trouvé une piste de réflexion sur la nature humaine et ses travers, sur la façon de percevoir les gens, qui ne peut pas toujours noire ou blanche.
Un roman marquant.
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