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Patte Blanche - Kinga Wyrzykowska

Patte Blanche

Auteur : Kinga Wyrzykowska

Editeur : SEUIL (19/08/2022)

320 pages

Résumé :

Les Simart-Duteil ont marqué votre enfance. Leur nom si français, leur maison flanquée d'une tourelle - comme dans les contes -, leur allure bon chic bon genre ont imprimé sur le papier glacé de votre mémoire l'image d'une famille parfaite. Un jour, pourtant, vous les retrouvez à la page des faits divers, reclus dans un manoir normand aux volets fermés. Les souvenirs remontent et, par écran interposé, vous plongez dans la généalogie d'un huis clos. Paul, Clothilde, Samuel ont été des enfants rois. Leur père, magnat des autoroutes au Moyen-Orient, leur mère, Italienne flamboyante, leur ont tout donné. Quand un frère caché écrit de Syrie pour réclamer sa part de l'héritage, la façade se lézarde. Les failles intimes se réveillent. Paul, dont la notoriété d'influenceur politique commence à exploser, décide de prendre en main le salut de son clan. Une lutte pour la survie de la cellule familiale se met en branle. Et "l'étranger" a beau montrer patte blanche… il n'est pas le bienvenu. Une fable qui porte un regard d'une grande finesse sur le climat social et la peur de l'autre.


Avis :

C'est dans le cadre du Prix Roman CSE Arquus organisé par mon entreprise que j'ai découvert Patte Blanche. Je vous avoue qu'il ne faisait pas partie de ma sélection de départ et qu'il ne m'inspirait pas forcément au premier abord… D'autant plus que les premiers retours n'étaient pas forcément enthousiastes.

Si j'ai ouvert ce roman de la rentrée littéraire dernière sans grandes attentes, j'ai été agréablement surprise par ce que j'ai trouvé entre ses pages.

Une ambiance à la fois particulièrement anxiogène et prenante. Kinga Wyrzykowska nous plonge dans l'intimité d'une famille nombreuse, père décédé et enfants adultes. Avec une écriture sans aucun dialogue matérialisé, elle nous permet de pénétrer l'esprit des différents membres de la famille qui, tous, présentent des névroses. A mesure que nous découvrons les peurs de chacun et certains éléments du passés, qui ont laissé une trace plus ou moins importante sur la psyché des personnages, un quatrième frère se manifeste. S'ensuit alors un bras de fer familial sur la conduite à tenir et sur les implications de cette nouvelle.

Qu'il est délectable de visualiser les changements de comportements qui s'opèrent au fur et à mesure de l'avancée de l'intrigue, les failles qui se creusent. L'image parfaite de la famille modèle vole en éclat, le père tout puissant est désacralisé et le vilain petit canard de la famille prend de l'assurance. De fils décevant, il devient l'homme sur qui on peut compter. Celui qui va tout résoudre et sortir la famille du mauvais pas dans lequel le père l'a plongée.

Malgré tout, on ressent un certain malaise à la lecture. Pour le destin qui semble s'acharner et les perspectives qui se ferment. Dans une intimité sans tabou, entre la mère vieillissante qui refuse d'en voir les signes et fait tout pour les effacer, le fils médecin esthétique qui voue une passion à son métier et ne sais pas parler aux patients, la fille mère au foyer, désœuvrée, en questionnement constant et Paul, le fils ainé, le sauveur, sûr de son talent que personne ne sait voir et dont la paranoïa grandissante n'a d'égale les injustices dont il est victime. A travers le frère caché, qui écrit de Syrie, mais aussi avec les attentats de 2015 qui sont évoqués dans Patte Blanche, l'autrice décrit la psychose née de l'incompréhension, la peur constante et l'influençabilité des gens.

Qu'il est intéressant de savoir que Patte Blanche est réellement inspiré d'un fait divers !

A la manière d'un quidam surfant sur internet, nous retraçons, au gré des publications, le parcours de la famille Simart-Duteil. C'est destructuré et pourtant admirablement bien construit, ça a l'allure d'un esprit en ébullition, d'une réunion de famille où tout le monde parlerait en même temps. Ce n'est pas forcément tout beau tout rose, mais c'est la vie, sa triste réalité, pas toujours juste. Quelques passages sont parfois un peu longs; mais pour un roman sans dialogue, il se lit étonnement bien ! D'autant plus que la fin est magistrale. Tellement inattendue que l'on est tenté de relire plusieurs fois la révélation qui nous scotche. Elle remet en perspective la totalité de l'intrigue la faisant passer d'une banale histoire de famille à tout autre chose. Elle nous laisse, aussi, des questions plein la tête, avec le besoin de relire certaines pages pour comprendre ou imaginer notre propre fin.

Patte Blanche est un roman qui trotte dans la tête une fois la dernière page tournée et ça, ça veut tout dire.


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