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  • Photo du rédacteurElsa

Carolina Reaper - Morgane Montoriol

"Mais rien n'empêche de haïr l'homme qu'on vénère. De le vouloir mort, pieds ballants, nuque brisée par une corde atta-

chée à la branche d'un arbre. […] Les sentiments n'existent pas pour faire sens. Ils sont l'exact inverse.

L'illogisme dans sa forme la plus pure."



Caroline Reaper, c’est la plume décomplexée et gouailleuse de Morgane Montoriol. Un ton sans gêne et mégalo, pourtant totalement désabusé. C’est décalé. Rugueux. Mordant. Extravagant.

Les personnages ne sont pas attachants, mais ils ont ce truc en plus - des aspérités hautes comme des montagnes, râpeuses comme du granit, une présence évidente - qui donne envie d’en savoir plus. Ça m’a rappelé le ton de son premier roman, mais il y a ici davantage de puissance et de finesse. Une belle couche d’épaisseur en plus, aussi.


L’histoire baigne dans une atmosphère poisseuse et malsaine aux lourds relents de faux-semblants, dissimulés sous de parfaites façades dorées à l’or fin du pouvoir. Car la notoriété et l’argent rachètent tout, non ? La blancheur virginale de l’âme comme le toilettage de la conscience.

Il y a définitivement quelque chose de nauséeux entre ces lignes. Ça sent le soufre et les tréfonds de l’âme humaine. La violence qui couve jusqu’à déborder dans les plates bandes méticuleusement alignées au cordeau. C’est malaisant. Et pourtant d’une haute addictivité.


Ce livre, je n’ai pas pu le lâcher. Il m’a dérangée autant qu’il m’a intriguée. Si j’ai supputé certaines choses, d’autres sont arrivées sans s’annoncer, preuve que les fils du canevas étaient soigneusement enchevêtrés et que cette histoire n’était pas seulement cynique et tapageuse, opulente dans son histoire comme dans sa trame, mais tout aussi bien pensée.

Sans doute Too much pour certains, son extravagance à la noirceur crasse et décomplexée aura su me séduire de bout en bout.


Corolina Reaper, c’est un mélange de thriller et de roman noir sauce pétrole fumée, infusée au piment et déglacée à l’extravagance.


"Trop de mauvais souvenirs incrustés dans le plâtre. Cette maison, elle sentira mauvais jusqu’à ce que d'autres y mettent de meilleurs souvenirs. Moi je n'ai pas le talent de les collectionner. Pourtant j'ai celui de ne pas arrêter d'essayer."


"Des trentenaires bien roulées y en a plus d'un paquet, dans le coin. Et moi je ne suis pas vendue avec accessoires. Je n'ai pas l'option drôle. Je ne suis pas cultivée. Et mon intelligence est si maigre qu'on lui voit les os. Je ne me flagelle pas, c'est de la clairvoyance. J'ai au moins ça. Je suis bonne à baiser mais basta. Je n'ai qu'un corps. Et encore... Il nécessite des mises à jour régulières et une kyrielle de subterfuges. Côté professionnel, la page de mon CV est plus immaculée qu'une piste de ski. Pas une expérience respectable pour noircir le papier. Mon ambition s'est égarée quelque part il y a déjà un bout de temps. Je ne suis jamais partie à sa recherche.."


"Haïr quelqu'un c'est lui offrir le privilège d'exister en soi. C'est lui préparer un siège et en chauffer le cuir pour bien l’accueillir. C'est avoir la certitude de toujours le trouver là où on l'a rangé. À sa place. Dans son crâne et dans son coeur. Dans un nid douillet parfumé au fiel. Haïr quelqu'un c'est lui assigner une place dans l'endroit le plus prestigieux de son soi.

Et moi, je ne fais pas ça. J'ai rangé ma haine au frais. Elle repose depuis bien longtemps dans le congélateur de mon cœur. Je ne la sors pas. N'en décongèle pas un morceau. Je la laisse continuer de se durcir dans la glace."



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