L'ange déchu
Auteur : Marion Obry
Éditeur : Editions Plume Blanche (06/08/2019)
723 pages
Résumé :
Il fut un temps où le monde vivait dans l’amour de Dieu et sous la protection des Anges. Dans un passé lointain, Lucifer se rebella contre eux avant de créer les Enfers. Lui, l’Ange déchu, engendra de nombreuses lignées de Démons. Aujourd’hui, il prend sa revanche sur l’humanité et sur le Ciel.
- Dieu a créé les Archanges, mais même dans une telle perfection, il s'est avéré qu'il y avait en leur sein un mouton noir. Comprends-tu Cal ? - La perfection n'existe pas…
Avis :
Si j’ai décidé de sortir L’ange déchu de ma PAL (pack Plume Blanche 2019), c’est sous l’impulsion d’Ophélie Duchemin qui avait l’air tellement captivée par sa lecture !
Je donc dépoussiéré ce beau pavé de 723 pages (c’est une intégrale) afin de m’y frotter. Malgré l’appréhension (du sujet et du volume de la bête), la magie a tout de suite opérée et j’ai eu un coup de cœur pour l’univers et la plume de Marion Obry.
L’objet livre est également superbe, avec ses illustrations de Jean-Mathias Xavier à chaque nouvelle partie du roman, et sa galerie de personnages. Seul petit bémol, je me suis auto spoilée en regardant les dessins en avance. Ne le faites pas !
Cet avis est très difficile à écrire car je n’arrive pas à ordonner ma pensée et mettre des mots sur ce que j’ai ressenti à la lecture. Pourtant, Dieu sait que ça a bouillonné dans ma poitrine !
Marion Obry construit son univers fantastique autour d’un socle de croyances. La théologie, et plus particulièrement la religion chrétienne, est au cœur de son histoire. Elle nous y révèle des mythes, parfois cachés par l’église, et remanie à sa sauce les différents évènements contés par les textes sacrés. J’ai d’ailleurs particulièrement apprécié le lien fait entre le récit et des extraits de textes religieux, tels que l’évangile, le livre de l'Apocalypse ou encore l'Exode. Et c’est extrêmement bien mené, c’est extrêmement bien écrit, c'est un régal pour l'esprit. Les descriptions sont hyper précises et détaillées, on sent que tout est très bien documenté.
Dans l’ange déchu, il est perpétuellement question de la frontière bien / mal, amour / haine ou de l'absence d'émotions… Tout est histoire de point de vue ou d'interprétation et cela, Marion nous le démontre fort bien. Un meurtre est un meurtre, mais tuer un démon peut être pardonné non ? parce que par ce geste, on protège la population humaine. Il serait donc plus acceptable de tuer un individu, tout maudit soit-il, plutôt qu'un autre ? A quel moment franchit-on la ligne ? Si, on conserve malgré tout une certaine conscience, on ne peut nier la facilité qu’il peut y avoir à basculer dans les ténèbres. Après tout, pourquoi souffrir alors qu’en passant de l’autre côté la vie est si simple. Même si se "sauver" c'est condamner les autres.
L’Amour est une variable prépondérante dans cette quête vers la lumière ; amour fraternel, amour charnel, amour de son prochain. Est-il possible de sacrifier l’Amour de sa vie pour sauver le reste de l’humanité ? Manigances et coups bas sont au programme ; on se retrouve embarqué dans une immense partie d’échecs dont on ne sait pas très bien qui sont les pions… C’est parfois très dur à concevoir pour nos petits cœurs fragiles, pourtant, ça nous force également à ouvrir notre réflexion. L'évolution de la pensée de certains personnages est vraiment intéressante et nous permet de saisir que tout est éphémère.
Mais ce qui est le plus spectaculaire dans l’Ange déchu, c’est quand on prend conscience que tout ce qu’on a lu n’est peut-être pas ce qu’il y paraissait au premier abord. Il faut peut-être lire entre les lignes ou voir les choses sous un autre angle. C’est vraiment machiavélique et ça confirme le talent de Marion dans toute la construction de son œuvre.
Les évènements de l’Ange déchu se déroulent dans un futur plus ou moins lointain de notre époque (j’ai d’ailleurs beaucoup aimé le lien et le petit clin d’œil qui est fait à notre temps et nos démons modernes). Qu’on se le dise, c’est un roman sombre et sanglant. Il y a peu de lumière, et les ténèbres progressent chaque jour un peu plus sur Terre. L’espoir de l’humanité, ce sont les Hunters ; ces surhommes qui chassent les créatures du diable, afin de protéger les humains. Ils sont organisés en Guilde et ont leurs propres codes, leur propre mode de vie et leur propre façon d’appréhender le monde. Ils forment une grande famille unie, qui côtoie la mort en permanence. Vampires, loups garous, goules, wendigo, sorcières et autre démons sont également de la partie. Côté céleste, nous côtoyons anges et Archanges. Enormément de personnages, énormément d’actions en parallèle, mais un seul fil conducteur. On rentre directement dans le vif du sujet, en suivant deux Hunters en pleine chasse, à des kilomètres de distance ; et on ne reprend son souffle qu’à la toute dernière page (et encore, le coup final a plutôt tendance à nous le couper).
Si je ne me suis identifiée à aucun personnage en particulier, j’ai tous (ou presque) su les apprécier pour une raison ou une autre. Les interactions sont parfois détonantes et les répliques bien senties pour notre plus grand plaisir. J’ai eu un petit faible pour Sébastian, l’un des Hunter du départ, et son côté solitaire, froid, qui ne veut pas s’attacher parce que… Il ne vit que pour sa mission : tuer tous ses démons qui envahissent la terre. J’ai également adoré la Païenne, que l’on ne rencontre que plus tard, cette sorcière, qui préfère rester neutre, parle un peu comme une prophétesse, à la troisième personne, et semble connaitre l’avenir.
Qu’on se le dise tout de suite, L’Ange déchu n’est pas un livre où tout est bien qui finit bien (enfin, ça dépend de quel point de vue on se place ^^), c’est un livre qui heurte (c’est gore par moment), un livre qui, sous couvert de fiction et de croyances, fait ressortir la vraie nature humaine. Et ce n’est pas l’altruisme qui prime !
En fait, je pense qu’il faut le lire pour en saisir toutes les nuances et subtilités, chacun aura probablement une manière différente de le déguster. Jusqu’à plus soif, en mastiquant avec soin ou en une seule bouchée.
Il se concentra alors sur les sons, notamment sur le bruit des arbres. Ce chant triste et sinistre qu'ils colportaient n'était accessible qu'à ceux qui savaient écouter. Les gens comme Cal l'avaient gentiment nommé : le Requiem du Monde.
⛤⛤⛤
La Sorcière ne fit aucun commentaire, mais elle semblait en penser tout autant. Elle était intimement convaincue que les femmes n'avaient jamais eu besoin des hommes pour vivre, mais qu'elles leur avaient donné cette illusion au début de la création du monde afin de ne pas les blesser dans leur orgueil ou de les manipuler plus facilement… Avec le temps, ils avaient pris leur rêve pour une réalité.
Comments