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Motus et cœurs cousus - Léa Volène

Motus et cœurs cousus

Auteur : Léa Volène

Editeur : L'ARCHIPEL (19/01/2023)

374 pages


Résumé :

Après le décès de ses parents, Marjorie, unique héritière, pose ses valises dans la maison familiale. Dans la rue du cimetière, l’emménagement de cette jeune mère de famille et de sa fille adolescente ne passe pas inaperçu. D’autant que, dix-sept ans plus tôt, son départ précipité du village suivi de la disparition de sa sœur avaient fait grand bruit. Puis plus rien, le silence absolu. Difficile alors de revenir sans attirer les regards curieux notamment celui de Marcel, leur voisin acariâtre. Alors que Marjorie imagine une vie paisible, un mystérieux arrangement du passé refait surface. Mais est-il vraiment possible de cacher un trop lourd secret ?



Prise au dépourvu, je ne sais jamais trouver la bonne répartie. Enfin si, une fois que je suis seule, enfermée dans les toilettes, cinq à six heures après l'évènement.

Ce n'est pas moi qui suis glauque, c'est juste vous qui avez un problème avec la mort. Parce que la mort, elle vous a rien fait, en fait. Ce n'est pas elle qui provoque le malheur. C'est la vie ça. C'est elle qui abime et percute. La mort, elle fait juste son taf.

Avis :

Lorsque j'ai vu que roman de Léa Volène sortait dans la collection Instants Suspendus, c'était un évidence : je le lirai. Parcourir le résumé ? à quoi bon ? Je n'ai jamais été déçue par un roman de cette collection et j'ai eu un coup de cœur pour le roman Souviens-toi d'aimer de Léa.

Je me suis plongée avec délice au cœur de cette histoire ô combien prenante. A travers la plume punchy de l'auteure, sa capacité à taper juste dans ses analyses, et son humour, j'ai découvert des personnages vivants, attachants, émouvants. Plus je m'enfonçais dans ma lecture, moins j'arrivais à en sortir et plus je l'appréciais.

Tout commence avec du mystère : Léa Volène nous fait pénétrer dans le quotidien de Marjorie, et de sa fille, Anouk. Elles prennent un nouveau départ mais Marjorie semble enracinée dans le passé, à tel point qu'elle s'adresse, dans sa narration, à une mystérieuse personne dont on brûle de connaitre l'identité. L'auteure choisit ses mots avec soin, afin d'en révéler le moins possible sur cet individu. Mais le lecteur, emporté par la dynamique du récit, a de quoi faire des suppositions qui s'avèreront fondées au non.

Et puis… et puis, les personnages nous saisissent, nous prennent par la main pour ne plus nous lâcher. Chacun avec leurs fêlures, leur besoin de se protéger, de ne pas se dévoiler. Chacun avec leur caractère pas toujours facile et leur carapace souvent très épaisse. Mais surtout, chacun avec cette humanité intrinsèque. J'ai tellement aimé la petite Anouk et sa force de caractère, son don pour toucher les autres, en disant ce qu'elle pense, son univers bien à elle et sa façon d'être tout simplement. Marjorie aussi. Je me suis parfois reconnue en elle, dans ses doutes, dans sa nostalgie, dans ses peurs. Sans oublier Marcel, le cynique, qui repousse tout le monde loin de lui ou Ruben, le gentil voisin pâtissier de talent. Mais par dessus tout, ce sont les liens qui se créent, lentement, avec difficulté parfois, qui subliment le récit.

Et puis… la personne à qui s'adresse Marjorie se révèle et surgit alors la question du : pourquoi ? Là encore, les spéculations vont bon train. Les masques tombent, les cœurs s'ouvrent, les réticences se délitent et la compréhension fleurit. Léa a extrêmement bien construit son récit et elle a parfaitement dosé ses personnages. C'est une histoire de famille, avec ses joies, ses peines, mais aussi ses secrets. C'est une histoire de famille avec ses absents, ceux qui manquent mais sans lesquels il faut continuer. C'est une histoire de vie, de rencontres avec des personnes imparfaites, qui ne savent pas toujours communiquer et qui font comme elles peuvent pour avancer. C'est une histoire qui s'est transformée d'un moment agréable à quelque chose de vrai : qui m'a fait rire (sur la canapé, à côté de mon mari qui m'a demandé ce qu'il m'arrivait), qui m'a donné la chair de poule, qui m'a serré le cœur. C'est une histoire coup de poing qui m'a poussée, à pénétrer, pour la première fois, dans le cimetière de la ville où je vis.

Un moment hors du temps.


- Vous auriez une gomme ? - Je n'utilise pas de gomme, me répond-il sans s'arrêter de dessiner. - Comment ça, vous n'utilisez pas de gomme ? Comment vous faites quand vous vous trompez ? - Je fais comme dans la vie. J'essaie de réparer, de camoufler, d'adoucir mon erreur. Mais je n'efface pas.

Je suis en colère parce qu'il est plus facile de laisser ce sentiment exploser que d'accepter les émotions contradictoires qui se bousculent au fond de moi. Elle sert à ça, la colère. A camoufler ce que l'on n'est pas prêt à accepter, à recouvrir la mélancolie sous un parterre de mauvaise foi.
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