La terre de tous les possibles
Le Vent de l'espoir tome 2 sur 2
Auteur : Anna Jacobs
Editeur : L'Archipel (23/01/2025)
480 pages
Résumé :
Australie-Occidentale, 1876. À dix-huit ans, Cathie aspire à une vie plus palpitante que celle qu'elle mène dans le bush. Aussi, saisit elle sa chance quand un de ses oncles lui suggère de partir pour le Lancashire, la terre natale de sa mère Liza.
Cathie s'enfuit de chez elle, ignorant que son oncle la manipule pour se venger de Liza… Agressée dès son arrivée sur les quais à Liverpool, Cathie ne doit son salut qu'à l'intervention d'un homme, Magnus, chez qui elle va trouver refuge. Mais elle a perdu la mémoire…
Tandis que ses souvenirs refont peu à peu surface, Cathie découvre aussi le passé de sa mère et les raisons qui, vingt ans plus tôt, l'ont poussée à fuir. Des secrets qui pourraient aujourd'hui menacer le bonheur de la jeune femme…
Avis :
L'an dernier, j'avais beaucoup aimé Vers la terre promise et l'histoire de Liza, cette jeune anglaise contrainte d'immigrer en Australie pour fuir un futur peu enviable. J'avais, tout au long du récit, tremblé pour elle et espéré qu'elle ait enfin droit à un peu de bonheur… c'est donc sans aucune surprise que je me suis plongée dans ce second tome, peu de temps après l'avoir reçu. Lorsque je l'ai commencé, j'avoue que je n'avais absolument plus en tête l'intrigue ni les personnages. Pourtant, tout est très vite revenu et l'autrice sème de nombreux rappels, absolument pas rébarbatifs, dans sa narration, qui permettent de resituer de manière très claire les différents évènements et protagonistes.
J'ai à nouveau eu un coup de cœur pour la plume d'Anna Jacobs. J'aime la manière dont elle nous plonge dans le quotidien de ces hommes, et surtout ces femmes, d'une autre époque au courage incommensurable. J'aime la manière dont elle décrit les paysages, et surtout les sentiments. J'aime sa capacité à convaincre totalement son lecteur de faire abstraction des petits défauts qui auraient pu, dans un autre contexte, dans une autre histoire, l'exaspérer : ces rencontres parfois trop simples qui tombent un peu trop bien, ces personnages parfois caricaturaux ou ancrés dans leur ressentiment, ceux qui changent un peu trop facilement d'état d'esprit…
Si Cathie, la fille de Liza, m'a passablement énervée au départ avec son esprit capricieux, j'ai rapidement apprécié suivre ses pérégrinations. J'ai aimé la voir prendre conscience de la chance qu'elle avait et qu'elle ne mesurait pas, j'ai aimé la voir grandir et trouver sa voie. J'ai adoré le lien qu'elle tisse avec son demi-frère, affreusement seul dans son manoir dénué de chaleur humaine. J'ai retrouvé avec joie Liza et Bénédict, malgré les circonstances dramatiques du début du récit; leur complicité intacte après toutes ses années, les voir goûter au bonheur, entaché d'épreuves mais toujours avec force et courage. Liza reste ce personnage solaire que j'avais adoré découvrir dans le premier opus et sa condition de mère est fortement éprouvée ici. Malgré tout, on ressent l'amour inconditionnel qu'elle porte à ses enfants.
Ce qui est à la fois frustrant et source de malentendus, ce sont les convenances de l'époque couplées aux décisions prises par les personnages pour protéger ceux qu'ils aiment. Ainsi, les ragots vont bon train, entachant parfois la réputation de personnes tout à fait honorables; ainsi, des situations sont générées par des non-dits, par le nom d'un père tu, une discussion surprise par inadvertance ou des profiteurs. Les secrets et les rancunes se cristallisent jusqu'à être mal interprétés ou nourris de fausses informations. Si tout cet aspect est amplifié par les conditions de vie, moyens de communication ou mœurs de l'époque, c'est une réalité destructrice et universelle : l'impact d'un secret de famille sur des générations.
Anna Jacobs arrive à faire naitre inquiétude et sentiment d'injustice à la lecture; elle crée des personnages fondamentalement bons pour lesquels on aspire à un dénouement heureux, avec, toujours, une pointe de modernité. Modernité qu'on retrouve dans ces femmes indépendantes, bien que toujours soumises au bon vouloir des hommes, ou ces hommes sensibles et compréhensifs qui peinent à trouver une place dans la société patriarcale basée sur les titres de noblesse de l'époque. Elle nous balade entre une Australie sauvage, peuplée d'anciens forçat et de famille désargentées et une Angleterre ancrée dans une domination des classes et une toute puissante des "grandes" familles. Elle trace le destin d'une nouvelle génération de personnages et, comme dans le volet précédent, certaines situations sont très violentes; il est difficile de voir ce que l'homme est capable d'infliger à l'homme pour une question d'argent, de pouvoir ou de certitudes.
Il me semble que La terre de tous les possibles est le dernier tome de la saga Le vent de l'espoir. Sa conclusion est, dans tous les cas, une belle conclusion qui laisse le lecteur apaisé. Pourtant, j'avoue que je n'aurais pas refusé retourner à Lizabrook pour découvrir la destinée d'un autre des enfants de Liza et Bénédict.
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